Dans cette histoire, il est question d’un mystérieux microscope en or massif, d’une fausse lettre d’invitation déposée sur un bureau et d’un couple pour le moins étrange…

Pour en savoir plus, je vous propose de plonger un instant au sein des coulisses de l’évènement « Voir l’invisible », une opération phare de la Fête de la Science que nous avons proposée au Quai des Savoirs.

Tout a commencé avec une thématique, la microscopie, et un concept original et ludique, une enquête à résoudre…

L’objectif de cet évènement était donc simple : il fallait concevoir une enquête scientifique qui permettrait au public de découvrir l’univers de l’infiniment petit par le biais de la microscopie.

Première étape : cerner le sujet

La thématique choisie pour cet évènement s’est révélée être riche d’intérêts.

Interdisciplinaire

D’une part, la microscopie relie une multitude de disciplines scientifiques. Physique, chimie, sciences de la vie et de la terre, matériaux, biologie pour n’en citer que quelques-uns, sont les domaines d’études les plus représentatifs de l’utilisation de la microscopie. Il était donc important de mettre en lumière cette interdisciplinarité à travers l’enquête.

>> Pour cela, nous avons créé trois « pôles d’expertise » afin de regrouper les indices selon le domaine auquel ils étaient rattachés : la biologie, l’environnement et les matériaux. Trois espaces ont donc été mis en place où le public est invité à réaliser de petites expériences d’observation pour analyser les indices de l’enquête.

Petit + : afin de pouvoir gérer le flux de public sur l’exposition, nous avons également décidé de ne pas contraindre le sens de visite de ces pôles. Ils pouvaient donc être étudiés dans l’ordre souhaité sans que cela n’entrave le bon déroulé du jeu. Et de ce fait, tous les indices doivent être analysés pour que l’enquête soit résolue !

Touchant de nombreux laboratoires

D’autre part, il existe de nombreux laboratoires locaux dotés de microscopes de pointe.

>> Un appel à participation a alors été lancé afin de proposer aux chercheurs de la région d’intervenir dans le cadre de l’enquête et d’échanger avec le public.

Esthétique

Enfin, de par l’utilisation de lumière et d’échantillons colorés, cette discipline revêt une esthétique particulière. Cette dimension « Art-Science » fut donc un terrain d’exploration très intéressant pour la scénarisation et la mise en ambiance de l’enquête et de l’exposition.

>> La mise en ambiance de la salle d’exposition se résumait donc à plusieurs projections d’observations microscopiques sélectionnées en fonction de leur esthétique visuelle et de la nature de l’échantillon observé. L’intérêt ici était de susciter la curiosité et l’étonnement chez le public en présentant des photographies d’objets du quotidien, mais vus au microscope avec un fort grossissement.

Deuxième étape – pas si simple ! : trouver le point de départ du scénario

L’étape suivante fut donc celle de l’élaboration du scénario d’enquête.

Un brainstorming

Pour cela, plusieurs séances de brainstorming furent nécessaires afin d’envisager toutes les possibilités s’offrant à nous…

« Une machine à remonter le temps aurait été retrouvée au beau milieu de la salle d’exposition du Quai des Savoirs avec à son bord le squelette d’un inconnu… »
« Des travaux dans les sous-sols du Quai des Savoirs ont permis de révéler la présence d’objets archéologiques… »
« À l’occasion de la Fête de la Science, une conférence très attendue fut programmée pour présenter les dernières découvertes d’un célèbre chercheur en astrophysique. Stressé par cet évènement majeur dans sa carrière, il consacra toute sa soirée à répéter son discours sur scène, au Quai des Savoirs. Mais un drame arriva et l’on retrouva son corps sans vie, le lendemain matin… »

Inventer des histoires n’a pas été compliqué pour nous. Le plus difficile était surtout de pouvoir les scénariser pour créer un jeu grandeur nature. Lorsque l’on m’avait annoncé : « Bon, Léna, c’est la Fête de la Science dans un mois, du coup tu vas travailler avec Richard sur la mise en place d’un scénario d’enquête sur la thématique de la microscopie !», je n’avais pas pu m’empêcher d’être ravie ! Qui ne rêve pas de pouvoir concevoir un tel évènement ? Un cluedo géant ! Puis les jours et les semaines ont passé et… je me suis rapidement rendu compte que c’était finalement loin d’être simple et évident. Une multitude d’idées et d’envies se bousculaient dans nos têtes et il fallait absolument aller au-delà pour satisfaire le public et surtout pour imaginer quelque chose de réalisable dans les temps.

Un décor inspirant

L’élément déclencheur fut la rencontre avec l’équipe du Centre de l’Imaginaire Scientifique et Technique de Montpellier qui nous permit de déterminer le contexte de l’enquête : le XIXe siècle. Possédant de nombreuses archives et une collection importante d’objets de cette époque, ils nous ont proposé de créer deux « scènes » en rapport avec l’histoire que nous souhaitions mettre en place. Le décor était donc posé.

Un lieu et son passé

Afin d’affirmer le côté réaliste et attractif de l’enquête, nous nous sommes ensuite attardés sur le scénario de l’histoire qui devait avoir un lien direct avec le lieu de l’évènement : le Quai des Savoirs. Après plusieurs recherches historiques, notre choix s’est porté sur le cas de Paul Sabatier qui fut le doyen de la Faculté des Sciences en 1906. Ensuite, il fallut définir l’origine de notre enquête : un meurtre ? Une disparition ? Une scène de vandalisme ? Un cambriolage ? En terme de mise en place des indices et de leurs analyses, la dernière proposition nous sembla la plus pertinente et la moins risquée. Mais, qu’est-ce-qui aurait bien pu être volé à Paul Sabatier ? Étant dans la thématique de la microscopie… l’objet de toutes les convoitises serait un microscope, en or massif ! Un trophée qu’il aurait obtenu grâce à ces nombreux travaux de recherche en chimie.

Une rencontre avec de vrais policiers

Puis une rencontre privilégiée fut organisée avec deux anciens membres de la police scientifique et technique de Toulouse. Cet échange fut d’une grande aide pour évaluer les différentes possibilités qui s’offraient à nous en terme d’analyse d’indices : empreintes digitales, encre et écriture, traces de sang ou de peinture…

Troisième étape : développer l’histoire à partir des ressources à disposition

L’étape suivante fut d’envisager les ressources que nous avions à notre disposition.

Les indices et pôles d’analyse

Les chercheurs du laboratoire Géode et de la plateforme Tri-Génotoul avaient répondu à notre appel à participation. Ils étaient alors en mesure de nous proposer diverses photographies d’observations microscopiques. Leur présence durant l’évènement devait également être prise en compte, c’est-à-dire qu’il était important de les intégrer au sein de l’enquête afin qu’ils puissent apporter davantage de contenu et de manipulations au public. En fonction de leurs ressources nous avons donc étoffé l’histoire de notre enquête et nous avons surtout définis les différences indices pour les relier directement avec le scénario et le profil des personnages.

L’écriture du scénario

Et c’est avec sa plus belle plume que Richard réalisa l’écriture du scénario de l’enquête ainsi que la description des personnages.

Quatrième étape : créer les supports de l’enquête

Des documents remis au public

Puis nous avons décidé que l’ensemble de ces informations – qui s’avèrent être cruciales pour comprendre et résoudre l’enquête – devaient être rassemblées sur un unique document qui serait remis au public. Un « carnet d’enquête » a alors vu le jour, composé du scénario de l’enquête, du profil des personnages de l’histoire (victime et suspects) et d’un tableau d’enquêteur à remplir par le public. Puis, pour rester dans l’idée d’un jeu grandeur nature, il m’a semblé intéressant de créer des « cartes indices » que chaque joueur pourrait utiliser et analyser par le biais de divers ateliers d’observation.


Un parcours de médiation finalisé

Arrivés à cette étape de conception, le déroulé de l’animation se dessina (enfin !) sous nos yeux… Je vous avoue que le plus difficile dans ce travail fut de se projeter et d’imaginer la mise en place de cette enquête avant même que tous les éléments ne soient conçus (mobilier, visuels, scénario d’enquête…). Et puis cet évènement à destination du « grand public » devait bien évidemment être accessible à tous, petits et grands. L’enquête devait donc être ni trop simple à résoudre ni trop compliquée à comprendre… Un vrai challenge !

Mais tout se passa comme nous l’avions imaginé et voici le parcours que nous avons imaginé : le public est accueilli par un médiateur qui l’invite à se plonger au cœur même de l’enquête en lui racontant la terrible histoire de vol qu’a connu Paul Sabatier lorsqu’il occupait le poste de doyen de la Faculté des Sciences en 1906. Puis arrive ce lien étrange avec le présent qui a soudainement permis de ré-ouvrir cette enquête et de ressortir les indices recueillis à l’époque par la police pour tenter de résoudre cette histoire et surtout de trouver les coupables… Affaire à suivre 😉

Une petite conclusion ?

Suite à cette expérience, il me semble intéressant de soulever le fait que nous avons dû partir des ressources que nous avions à notre disposition pour restreindre nos possibilités. Cela nous a permis d’établir un cadre à notre enquête et dans un second temps de relier les différentes ressources que nous avions à notre disposition.

Cette expérience de conception d’un scénario d’enquête fut d’une grande richesse et l’accomplissement de ce travail fut de pouvoir animer cet évènement, d’accompagner le public sur la résolution de l’enquête et surtout de les plonger au cœur de notre histoire…

Mais d’ailleurs, voilà une question intéressante que tout le monde nous a posée : cette fameuse histoire, est-elle vraie finalement ? A vous de mener l’enquête… 😉

par Léna Robert

Léna est volontaire en Service Civique au sein de Science Animation