Notre équipe a présenté un nouveau projet d’escape game que nous avons développé avec des enseignants-chercheurs de l’INSA de Toulouse et de l’Université Toulouse III – Paul Sabatier et le soutien d’ANITI. L’enjeu et l’originalité de ce projet est son format. Rappelez-vous…

[…] l’escape game est composé de 4 parcours de jeu, afin de pouvoir diviser la classe en petits groupes d’élèves. Chaque groupe possède une mallette avec plusieurs modules qu’il faut résoudre au cours de l’histoire. Les 4 mallettes sont réparties dans un espace de jeu. Chaque équipe posséde une zone de jeu bien délimitée. Commune à toutes les équipes, une mallette centrale, délivrera le temps écoulé et la résolution finale de l’histoire. Elle sera visible depuis toutes les zones.”

Certaines énigmes allaient être numériques, tandis que d’autres seraient dans un format plus “classique”. Autre point important et non négligeable pour le maître du jeu, c’est que cette mallette allait devoir faciliter le suivi des joueurs en validant certaines étapes du parcours. En somme, c’est un sacré challenge que nous nous sommes lancé !

Aujourd’hui, vous allez découvrir en avant première 3 énigmes de ce nouvel escape game. Attention, elles n’ont pas été choisies au hasard ! Il s’agit de 3 formats différents qui nous ont amené à nous adapter à diverses contraintes et à penser de nouvelles astuces techniques et graphiques. En fait, c’est un condensé des réflexions que nous menons depuis quelques mois maintenant.

Voici donc 3 conseils à retenir si vous souhaitez vous plonger dans la folle aventure de création d’un escape game mallette.

1. “Automatiser” la progression des joueurs : le maître du jeu / game master te remerciera

Comme nous vous l’indiquions précédemment, nous créons 4 mallettes identiques à quelques détails près. Une pour chaque parcours de jeu. Les 4 équipes se réuniront pour stopper le téléchargement de données qui est lancé sur une mallette centrale.

Pour accompagner chaque groupe et assurer leur réussite, plusieurs game masters seront présents pour suivre les joueurs dans leur progression. Idéalement, nous préconisons qu’un maître de jeu se dédie à un groupe. Cependant faute de moyens humains, la réalité fait que dans la majorité des cas, deux animateurs suivront deux groupes en parallèle.

Nous avons donc souhaité faciliter le suivi des joueurs par les game masters. C’est pourquoi nous avons profité du fait que certaines énigmes soient numériques pour développer un aspect “automatisation” de l’escape game. Pour faire simple, cela veut dire que l’on a pensé la mallette de sorte à ce qu’elle puisse valider ou non la progression des joueurs. Mais aussi, dans d’autres cas leur délivrer certains indices à des moments clés.

Vous imaginez comme cela peut être complexe d’anticiper le comportement des joueurs. Chaque équipe est différente de part la dynamique au sein du groupe, de la personnalité de chacun et de l’interprétation de chaque énigme. Nous avons donc intégré des indices très factuels pour qu’ils puissent convenir à n’importe quelle situation. Mais gardons en tête que le game master demeure un rôle indispensable pour la réussite des joueurs.

Pour vous expliquer cela plus concrètement, voici le fonctionnement d’une des énigmes de la mallette : “Association dates et événements”.

Il s’agit d’une énigme de réflexion et d’observation qui a pour but de présenter quelques dates importantes de l’Histoire de l’Intelligence Artificielle. Elle aborde notamment quelques notions et chiffres clés. Sa mécanique de jeu est inspirée du système de la grille de cardan qui consiste ici à entourer certaines lettres/chiffres d’un texte pour former un message codé.

N.B. : Vous remarquerez que certains aspects techniques ont été pensés pour “automatiser” la progression des joueurs.

Déroulement de l’escape game

  1. Les joueurs ont la mallette ouverte devant eux. Une partie de celle-ci est éclairée, ce qui leur indique que l’énigme est accessible et peut être résolue. Ils découvrent qu’il s’agit d’une grille composée de neuf cases. Chaque case comporte un nombre (une date ou un chiffre clé) associé à une information en lien avec l’intelligence artificielle.
  2. Les joueurs ont trouvé, via la fouille dans la zone de jeu, 9 pièces de puzzle en plexiglas. Sur chaque pièce est inscrit un message codé sous forme de symboles ainsi que des petits cercles rouges.
  3. Ils ont également récupéré en début de partie un carnet de notes qui contient une feuille de décodage. Sur cette feuille se trouvent plusieurs symboles qui sont chacun associés à un chiffre entre 0 et 9.
  4. Les joueurs peuvent déchiffrer les symboles sur chaque pièce de puzzle grâce à la feuille de décodage. Il s’agit des dates et chiffres clés inscrits sur la grille, dans la mallette. Ce décodage permet aux joueurs de savoir où positionner chaque pièce de puzzle sur la grille en faisant coïncider ces dates/chiffres clés.
  5. Si les 9 pièces de puzzle sont placées sur la grille mais aux mauvais endroits, alors une led s’allumera en rouge. Au contraire, si les pièces sont correctement placées sur la grille, alors la led s’allumera en vert. Les joueurs pourront alors relever les lettres entourées par les cercles rouges dessinés sur les pièces de puzzle. Cela formera un code pour débloquer un écran tactile et poursuivre vers une nouvelle énigme.
  6. Quelques secondes après la résolution de cette énigme, son contour lumineux s’éteindra pour laisser place à une nouvelle énigme disponible dans la mallette.

Ce fonctionnement lumineux intégré à la mallette, possède donc trois fonctions.

  • Sous forme de led : indique aux joueurs si leur résolution est correcte ou incorrecte.
  • Sous forme de pourtour lumineux : indique aux joueurs les énigmes accessibles ou non dans la mallette.
  • Enfin, sous forme de pourtour lumineux : permet au game master de repérer visuellement où en sont les joueurs.

2. Intégrer le contenu pédagogique aux énigmes

L’un des principaux enjeux de l’escape game pédagogique est de choisir avec rigueur les mécanismes en adéquation avec les contenus scientifiques et techniques. Dans notre cas, il ne s’agit pas d’intégrer des notions en rapport avec l’Intelligence Artificielle uniquement dans le scénario ou dans le décor. Mais aussi, que les contenus servent à la résolution des énigmes.

Un exemple très concret pour illustrer ce propos est de vous expliquer le fonctionnement de l’énigme : “Idées reçues”.

Les différentes étapes

  1. Les joueurs ont la mallette ouverte devant eux. Une partie de celle-ci est éclairée, ce qui leur indique que l’énigme est accessible et peut être résolue. Ils découvrent 7 emplacements de cartes vides, positionnés les uns à côté des autres.
  2. Ils ont trouvé via la fouille dans la zone de jeu. 7 cartes comportant chacune un intitulé différent tel que “Une IA ressent des émotions”, “L’IA peut apprendre de façon autonome”, etc. D’un côté de la carte, la réponse est mentionnée “FAUX”. De l’autre côté de cette même carte, la réponse est mentionnée “VRAI”.

Petite astuce pour indiquer aux joueurs l’ordre dans lequel les cartes doivent être placées les unes par rapport aux autres sans avoir à les numéroter. Le graphisme des cartes a été travaillé de sorte à ce qu’il représente un circuit intégré (en raccord avec le thème de l’escape game) qui se poursuit d’une carte à l’autre. Cela permet aux joueurs de savoir dans quel ordre positionner les cartes pour reconstituer le circuit dans son entièreté.

  1. En fonction de leur avis sur la question, les joueurs doivent positionner chacune des 7 cartes du côté VRAI ou FAUX. Ainsi que dans le bon ordre pour que les 7 emplacements dans la mallette soient pleins.
  2. Si les 7 cartes sont placées dans le bon ordre mais du mauvais côté ou du bon côté mais dans le désordre, alors une led s’allumera en rouge. Au contraire, si les cartes sont correctement placées (bon ordre et bon sens), alors la led s’allumera en vert.

Les joueurs pourront alors relever la lettre qui se trouve en bas de chaque carte. Cela formera un mot de 7 lettres et leur permettra de poursuivre vers une nouvelle énigme.

Cette énigme nécessite que les joueurs lisent le contenu des cartes. Ils doivent ensuite se mettre d’accord pour le côté de la carte qui leur semble être correct, VRAI ou FAUX. L’objectif est de les confronter directement aux idées reçues sur l’IA. Sans nécessairement faire appel à leurs connaissances. Mais plutôt à leur propre avis, quitte à susciter le débat entre les joueurs. En cas de mauvaise réponse, ils devront se questionner pour trouver la ou les cartes positionnées du mauvais côté.

3. Varier les supports (le numérique, mais pas que !)

Un autre point important à garder en tête lors de la conception d’un escape game est de veiller à ne pas dénaturer le concept. A son origine, le point and click consistait à cliquer un peu partout dans une salle virtuelle pour la fouiller, trouver des objets et les associer entre eux afin de résoudre des énigmes. Dans la version “grandeur nature” des escape games que l’on connaît aujourd’hui, la fouille demeure un élément clé qui permet aux joueurs de s’approprier physiquement l’espace dans lequel ils se trouvent.

Lorsque l’on conçoit un escape game auquel un groupe de joueurs va participer, il est important de maintenir cette phase de fouille. En effet, durant celle-ci les participants vont découvrir leur espace de jeu et récupérer des indices.

Dans le cas de notre escape game, nous avons veillé à garder des mécaniques de jeu qui s’appuient sur des concepts physiques et un temps de fouille nécessaire en début de partie. Ainsi, les joueurs débutent leur parcours d’énigmes en trouvant des indices répartis dans leur zone de jeu. Ensuite, nous avons opté pour un parcours emboîté, non linéaire. Les participants peuvent plus facilement se répartir les tâches dans la résolution des énigmes. Cet enchaînement permet d’éviter que les cinq/six joueurs se retrouvent en même temps autour de la mallette sans pouvoir tous y participer. Évitons de les frustrer !

Nous avons donc conçu la majorité des énigmes en mixant les supports numériques/électroniques et les supports plus classiques (papiers, objets…).

Ce dernier exemple s’appuie sur l’énigme que nous avons baptisée : “Tri”.

Il s’agit ici de la version prototype de l’énigme.

  1. Les joueurs trouvent un tableau de données (sous forme de nuage de points) accroché dans le décor ainsi qu’un écran tactile verrouillé, éclairé dans la mallette. Cet écran peut être débloqué grâce à un code composé de 4 symboles.
  2. Le nuage de points comporte des caractéristiques multiples (taille, couleur, numéro pair/impair…). C’est une base de données de traitement des contenus publiés par les antagonistes du scénario.
  3. Chaque caractéristique correspond à un critère de la base de données (thématique scientifique, nombre de publications, utilisation de biais cognitifs, sources vérifiables ou non…) et également à une partie du code à trouver.
  4. Pour chacun des 4 critères, les joueurs doivent relier les différents points concernés grâce à une cordelette récupérée dans une trappe de la mallette. Les points correctement reliés forment un symbole.
  5. Les 4 symboles obtenus leur permettent de débloquer l’écran verrouillé et d’accepter à la suite du parcours d’énigmes.

En résumé, bien que le format de l’escape game évolue depuis son concept initial (salle virtuelle > escape room > escape virtuel > escape box, etc.), il faut garder en tête les principes fondamentaux qui en font son succès. Cela vous aidera à proposer une expérience de jeu riche aux joueurs en variant les supports. Mais également en rythmant le parcours, en vous appuyant sur divers mécanismes, en pensant à la coopération entre les joueurs, en les incitant à s’approprier l’espace de jeu, etc.

Nous sommes au cœur de la phase de tests et de conception graphique et numérique des énigmes. Les prototypes deviennent petit à petit des éléments aboutis. Des indices sont notamment repensés et optimisé. L’escape game prend forme et la prochaine étape sera d’avoir une première mallette entre les mains !