Mission : créer un atelier d’éducation aux médias pour les plus jeunes
Au Plateau créatif, les élèves du CE2 au CM2 peuvent désormais participer à l’atelier scolaire “Décod’Image” d’éducation aux médias. Un défi qui pouvait paraitre impossible… sauf pour le Plateau créatif !
Quels secrets nous révèle l’atelier Décod’Image ?
Décod’Image a pour objectif de faire prendre conscience aux élèves qu’une image est une représentation, une reconstruction de la réalité. Pour y parvenir, l’approche du Plateau Créatif – cet espace d’apprentissage par le faire co-produit par le Quai des Savoirs, Planète Science Occitanie et Instant Science – est de faire expérimenter directement la création et la mise en scène d’images truquées ayant pour but de transmettre des émotions simples.
Durant les deux heures d’ateliers, les élèves vont traverser plusieurs étapes de réflexion prenant la forme d’activités. A l’issue de chaque activité, de nouvelles compétences sont acquises. Puis ces connaissances peuvent s’appliquer directement dans l’activité suivante. On peut découper l’atelier en quatre grandes étapes :
- l’introduction : va déterminer les objectifs et présenter les fondamentaux aux élèves
- le jeu de classement des images : permet d’aborder la notion de trucage
- la pratique : avec une tablette et un fond vert
- la restitution : résume ce qui a été vu au cours de l’atelier et laisse la place de partager ses questionnements
Animer un nouvel atelier qui aborde une thématique inédite est toujours enrichissant. Aussi bien pour les jeunes que pour les médiateurs !
Ce que je trouve pertinent avec celui-ci, c’est qu’il amène les jeunes à se questionner. Plus ils se questionnent, plus j’ai l’impression qu’ils s’ouvrent au monde. Un monde rempli d’images. Dans les films, dans les publicités, sur les réseaux sociaux, à la télévision, partout…
Chargée de mission médiation en Service Civique
Photomontage du Quai des Savoirs
Une image peut en cacher une autre…
La première phase permet à l’équipe de médiation d’initier la réflexion autour des images et ce qu’elles nous montrent. En affichant deux exemples de photomontage au tableau, la discussion est lancée : que peut-on dire de cette image ? A votre avis, est-elle vraie ou fausse ? Pourquoi ?
Par choix, la première que nous montrons est évidente, un dinosaure devant le quai des savoirs, impossible ! Par contre, la seconde est bien plus complexe. Que fait un soldat si proche de l’eau ? Un requin est-il aussi gros par rapport à un hélicoptère ?
Difficile de répondre à tout ça seulement avec une photo, et nombreux sont celles et ceux qui se font piéger !
On parle alors de trucage d’image, ce qui nous amène à la partie suivante.
Photo avec un filtre bleue
Vrai ou faux ? Telle est la question… Un jeu sur le trucage
La classe est séparée en plusieurs groupes de trois à quatre élèves et on leur explique le jeu de classement qu’ils vont réaliser. Le principe est simple, on distribue quatre images que les élèves doivent placer sur un plateau de jeu.
Ce plateau est composé de deux espaces : images avec trucage et images sans trucage. En groupe, ils et elles doivent se mettre d’accord sur l’emplacement de chacune des images. À la fin du temps imparti, chaque groupe va présenter son choix pour l’une des images.
Le médiateur ou la médiatrice demande aux groupes leurs arguments et leur présente d’autres images truquées (ou non) utilisant une de ces techniques : fond vert, filtre, photomontage, perspective.
Utilisation du fond vert
Place au tournage !
Vient le moment de la conception d’une image truquée.
Sont distribués à chacun des groupes un thème et une émotion qu’ils devront mettre en scène sur leur image.
Par exemple, le sport et la joie ou bien l’espace et la surprise. A partir de ces deux contraintes, les groupes doivent réaliser une image en utilisant une tablette, l’application chromavid et un fond vert. Des images de décors présélectionnées par l’équipe de médiation iront s’incruster sur le fond vert grâce à l’application chromavid. Pour s’immerger un peu plus dans la création, les élèves disposent de petits accessoires qu’ils peuvent utiliser dans la confection de leur image.
Pendant cette étape, c’est assez intéressant de voir émerger les personnalités de chacun. En fonction de celles-ci, les rôles se répartissent différemment. Cet atelier n’est pas seulement un outil pour développer l’esprit critique… Je le trouve aussi super pour le travail en équipe et la répartition des tâches !
Chargée de mission médiation en Service Civique
L’heure des questionnements
Une fois que tous les groupes ont fini leur création, l’équipe de médiation les rassemble pour effectuer la restitution en grand groupe. A chaque photo projetée, les élèves expriment l’émotion qu’ils ressentent en voyant l’image. Le groupe qui a pris la photo donne la réponse et explique ensuite les choix de mise en scène.
Ce temps est crucial dans un atelier, il permet de s’assurer que les messages ont été compris de la bonne manière. Le médiateur ou la médiatrice peut le vérifier directement en laissant les élèves s’exprimer, et aussi, s’expliquer entre eux les concepts abordés tout au long de la séance.
En tant qu’animatrice, j’ai aimé voir les jeunes construire leur esprit critique tout au long de l’atelier. Au début, ils ne se posent pas forcément la question de la provenance d’une image, de sa véracité ou de son intention. Peut-être qu’en repartant ils ne se questionneront pas plus qu’avant l’atelier. Mais j’aime me dire que nous semons une graine. Une graine qui germera plus tard, qui sait…
Chargée de mission médiation en Service Civique
S’adapter pour mieux créer
La conception de cet atelier a pour origine un réel besoin de la part des enseignants et enseignantes d’avoir une offre d’éducation aux médias adaptée aux élèves de l’élémentaire. Le succès de l’animation destinée aux collégiens, mais aussi des demandes pour des classes toujours plus jeunes, nous ont confortés dans ce choix pour une nouvelle réalisation.
Lors de ces premières étapes de la conception, le Plateau créatif a fait appel à plusieurs profils complémentaires : professionnels du domaine abordé, membres de l’éducation nationale, médiateurs et médiatrices. Tout le monde s’est réunit sur une après-midi consacrée à la réflexion de ce que deviendra l’atelier. L’objectif est de mutualiser les compétences pour avancer le plus rapidement possible dans la bonne direction, tant sur le fond que la forme.
Cette étape de cadrage a permis aux médiateurs et médiatrices chargés de la conception de rentrer dans une étape de travail plus fine. Dans un premier temps, il était important de réunir des bases théoriques sur lesquels les activités pouvaient s’appuyer. Un atelier d’éducation aux médias et à l’information ayant été précédemment conçu dans le cadre du Plateau créatif, nous disposions déjà de nombreuses ressources. Ce cadre théorique devait se mêler aux modules déjà existants du programme scolaire. Il est important pour les enseignants et enseignantes de pouvoir tisser des liens entre les sorties scolaires et ce qui est vu directement en classe.
Puis, est venu l’une des parties les plus difficiles de la conception. Il fallait sélectionner, parmi toutes les idées émises lors de la rencontre à plusieurs, celles qui se retrouveront réellement dans l’atelier. Cette étape était particulièrement complexe car assez frustrante. De nombreuses fois, il a fallu nous dire “il y a déjà trop de choses dans cet atelier”, ou bien “même si on a très envie d’en parler, on n’aura jamais le temps !”. Un atelier de deux heures passe très vite, et il ne faut pas le surcharger de messages et de contenus. C’est prendre le risque de le rendre fastidieux autant pour les participants que pour l’équipe de médiation.
C’est à ce moment que l’atelier a pris vie et dévoilé son identité. Et la partie la plus amusante pouvait commencer ! Tester les idées, les manipulations imaginées, les supports de médiations, trouver des astuces pour faire fonctionner l’ensemble… Évidemment, on a rencontré des obstacles et des déceptions quand tout ne marchait pas comme prévu. Mais cela poussait à être plus ingénieux. Mais attention à ne pas vouloir absolument trouver LA meilleure idée : elle n’existe pas forcément et on peut se perdre dans sa recherche.
Cela ne nous a pas empêché d’améliorer l’atelier et de le rendre le plus pertinent possible. Une opération n’est réalisable que seulement après de nombreux tests et retests des outils, mais aussi du temps d’animation.
Une démarche d’évaluation
Avant la sortie officielle de l’atelier dans le catalogue d’offres du Plateau créatif, plusieurs séances tests en conditions réelles ont été mises en place. Marlène Stricot, responsable études et conception par l’usage au Quai des Savoirs, était chargée de coordonner les opérations. Elle a plusieurs outils à sa disposition pour évaluer les dispositifs de médiation : questionnaires, entretiens, observations. Tout s’est fait en co-construction avec l’équipe de médiation qui a bonne connaissance du déroulé de l’atelier, qui peut argumenter certains choix dans la posture de l’animateur en fonction des messages à transmettre, et qui ne perd pas de vue les objectifs à atteindre.
Ces tests ont été réellement enrichissants et apportaient un regard nouveau sur l’atelier. Il est assez rare d’avoir l’occasion dans notre pratique d’évaluer aussi finement une activité, et de se pencher sur ce qui semble, à première vue, des détails, se révélant plus tard primordiaux. C’était une expérimentation nouvelle pour plusieurs d’entre nous, et ses bénéfices se font encore sentir.
L’expérience en tant que médiateur ou médiatrice d’atelier test a permis d’ajuster en “direct” ce qui n’allait pas. L’atelier est devenu plus concret et plus vivant, d’autant plus que nous disposions du regard d’une tierce personne.
Pouvoir débriefer et recueillir le ressenti des publics et des observateurs était précieux pour adapter notre animation par la suite.
Et, cerise sur le gâteau, on a pris en compte les remarques de chacun afin que tout le monde prennent plaisir à participer !
Les retours de cette étude se sont faits d’abord de manière orale, à chaud juste après les animations, pour échanger les premiers ressentis. Ils nous sont ensuite transmis sous la forme d’un dossier regroupant observations, citations et temps passé sur les différentes parties de l’atelier. Toutes ces informations servent à déterminer les points forts et les points faibles, tout en prodiguant des conseils sur la manière de faire évoluer l’ensemble.
A l’issue de ces fines observations effectuées sur chaque temps fort, certains contenus ont été retouchés. Nous avons remplacé certaines des images pour le jeu de trucage et pour la partie pratique, puis consolidé notre discours pour le rendre plus fluide et clair. On s’adresse parfois à des CE2 !
Selon moi, une des forces de cet atelier est l’âge du public. C’est important de donner des clés aux jeunes, pour qu’ils puissent s’interroger tôt sur les nouveaux problèmes du quotidien.
Chargée de mission médiation en Service Civique