Après avoir longuement arpenté les routes de la région pour initier les publics à l’univers des FabLabs à bord du Propulseur, Lucas fait désormais des kilomètres dans Luminopolis. Une exposition “en mode escape game” du Quai des Savoirs de Toulouse que nous animons avec Planète sciences. Des kilomètres oui, car entre l’accueil du public, l’accompagnement dans le jeu et le bilan final, il n’en finit pas de parcourir la grande salle d’exposition pour proposer la meilleure médiation possible aux nombreux visiteurs. Il nous raconte comment se passe une journée dans la peau d’un “Maître de la lumière”.

Depuis le 8 décembre 2018, Luminopolis, conçue par Cap sciences à Bordeaux, s’est installée au Quai des Savoirs. Un grand nombre de visiteurs a déjà franchi les portes de la Cité des Lumières. Ils ont tenté de percer ses secrets et de résoudre ses énigmes. Car oui, dans Luminopolis, les visiteurs doivent résoudre des énigmes en un temps limité s’ils veulent revoir la lumière du jour. Cette exposition a été conçue à l’image des escape games, et si vous suivez l’actualité de Science Animation, les escape games ne devraient plus avoir de secrets pour vous ! Mais je vais vous faire un léger rappel : vous êtes en équipe, enfermés dans une pièce, et votre objectif est de vous échapper (ou de désamorcer une bombe ou de trouver un remède à une épidémie, etc.) en 60 minutes maximum. Si vous n’y parvenez pas, qui sait ce qu’il peut vous arriver…

Une immersion par étapes

Dans un escape game, l’immersion joue un rôle extrêmement important et elle passe par différents médiums. Tout d’abord, le décor et la scénographie transportent le visiteur dans un lieu imaginaire. Puis, le maître du jeu se doit de préparer les participants en leur expliquant les règles. Mais surtout en leur racontant une histoire, un scénario de visite. Le maître du jeu sert ensuite d’aide dans l’escape game lorsque les visiteurs ne parviennent pas à répondre à une ou plusieurs énigmes. Ce rôle-là est joué par les médiateurs de Luminopolis, présents pour répondre à toutes les sollicitations des visiteurs. C’est donc une médiation en trois étapes que je vous détaille dans ce billet.

 

Prêts à relever le défi ? C’est parti, vous avez 30 minutes !

Cette exposition fonctionne à la séance et des groupes de visiteurs entrent dans l’exposition toutes les 30 minutes. Dans Luminopolis, le travail d’immersion commence dès que les visiteurs franchissent la porte d’entrée dans laquelle une salle d’accueil est aménagée. Les ambiances lumineuses et sonores plongent les visiteurs dans un autre univers, celui d’une ville futuriste avec des airs de vaisseau spatial. Lampes UV, mapping, lumières multicolores, de quoi se préparer pour la suite. Une fois la totalité du groupe rassemblé, il est temps d’expliquer les règles du jeu. « Bienvenue à Luminopolis, la Cité des Lumières ! ». Cette première phrase attire l’attention de tous.

Pour s’assurer que l’expérience de la visite se déroule au mieux, chacun des explorateurs de Luminopolis doit avoir compris les règles. Cette explication est donc un moment capital et le médiateur doit absolument avoir un discours clair. Mais cela ne suffit pas. Ce serait trop simple sinon. L’attention d’un visiteur pressé de visiter et de jouer ne dépasse pas les quelques instants.  Donc en plus d’être clair, il faut surtout rendre cette étape intéressante.

Médiation et humour

Tout d’abord, en tant que médiateur, je dois créer une motivation qui va pousser chacun à s’impliquer : « Au moment où vous franchirez la porte, vous serez bloqués ici pour la prochaine heure, et peut-être même plus ! Si vous voulez un jour revoir la lumière du soleil, vous devrez résoudre un certain nombre d’énigmes qui ont été préparées pour vous par les Maîtres de la Lumière ». Ensuite, c’est le moment des explications, ponctuées d’humour pour ramener l’attention de tous et appuyer certains éléments importants. Je trouve que l’on se souvient mieux de ce qui nous a fait rire. Rendre le discours plus agréable permet aussi de rattraper les sceptiques qui ne souhaitent pas particulièrement jouer, ou qui, tout simplement ont peur de ce fonctionnement nouveau pour eux.

Une fois la préparation du groupe terminé, des équipes de 2 à 5 joueurs sont constituées et partent à l’assaut de Luminopolis. Un objectif en tête : résoudre des énigmes pour réussir à s’échapper !

Du jeu, du challenge… et du contenu scientifique bien sûr

Une fois les visiteurs éparpillés dans Luminopolis, le travail de médiation continue. Il faut évidemment répondre aux questions sur le fonctionnement de certaines énigmes et de certaines mécaniques de jeux. Mais surtout, c’est le rôle des médiateurs d’apporter des explications et un contenu scientifique supplémentaire à celui déjà présent dans l’exposition.

En échangeant avec une équipe autour d’une énigme, je peux m’appuyer sur des exemples concrets et des manipulations en direct pour mettre en lumière certaines propriétés de… la lumière. Il faut aussi préserver le côté immersif de l’exposition et se placer dans un vrai rôle de Maître de la Lumière. Je connais évidemment toutes les réponses aux énigmes, mais il est hors de questions de les divulguer sans un minimum d’efforts en contrepartie. Quand une équipe est bloquée sur une énigme, j’ai différents moyens de les amener à trouver la réponse par eux-mêmes, et c’est souvent en leur posant des questions plutôt qu’en répondant aux leurs.

– « On a résolu l’énigme, mais la réponse n’apparaît pas…»

– « Vous avez cherché partout ? »

– « Oh ! C’était écrit ici. »

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– « Il n’y a pas de question ici. »

– « Qu’est-ce qui marque une question ? »

– « Un point d’interrogation… Ah ! Il y en a 3 ici ! Merci… »

Guider sans trop accompagner les visiteurs

Bien évidemment, il ne faut pas tomber dans le piège de trop accompagner un groupe. Il faut savoir garder de la distance pour leur laisser de l’indépendance. C’est intéressant dans un escape game de laisser les visiteurs se confronter à l’échec et à la difficulté. Toutefois, un système de couleurs permet de différencier la complexité des énigmes. En orientant les équipes vers des énigmes adaptées, les Maîtres de la Lumière améliorent l’expérience de jeu. C’est aussi notre rôle de les guider dans le dédale de Luminopolis, et de leur indiquer la sortie à la fin de la visite. Qu’ils aient résolu les énigmes ou non, d’ailleurs. Le Quai des Savoirs n’a pas l’espace nécessaire pour garder enfermées toutes les équipes perdantes 😉

 

Le bilan : une étape nécessaire

Une dernière étape attend les visiteurs avant d’être finalement libérée. C’est le moment du bilan. Je me sers de ce moment pour revenir sur les énigmes qu’ils ont rencontrées au cours de leur parcours. Un tableau des scores me permet de savoir quels types d’énigmes ont été résolues (facile, intermédiaire ou difficile) et combien d’erreurs ont été commises. C’est un moment privilégié durant lequel les équipes peuvent poser toutes les questions qui les taraudent, et souvent ils veulent des réponses aux énigmes qu’ils n’ont pas réussi à résoudre. Durant cette étape de bilan, je reviens aussi systématiquement sur des concepts essentiels de la lumière abordés tout au long de l’exposition, encore une fois en se basant sur les énigmes pour apporter des exemples concrets.

C’est un moment important aussi pour avoir un retour sur la qualité de la médiation et d’éventuels soucis à corriger. Si les visiteurs se plaignent de façon récurrente d’un problème qu’ils ont rencontré, c’est aussi aux médiateurs de s’adapter – dans la mesure du possible – pour que d’autres n’en souffrent pas. Et je sais qu’en deux mois et demi de médiation, j’ai transformé mon scénario d’accueil et ma façon d’aider les visiteurs au sein de l’exposition pour essayer de me rapprocher d’un idéal.

Une médiation adaptée aux groupes scolaires

Au sein de Luminopolis, nous accueillons aussi des groupes scolaires allant du CM1 à la Terminale. Cette variété est possible grâce aux grandes différences de difficultés dans les énigmes. Chacun peut donc y trouver son compte. Lors des visites scolaires, les médiateurs sont beaucoup plus à l’écoute des élèves pour leur transmettre le plus de contenu possible. Évidemment, si les professeurs cherchent à aborder un point bien précis concernant la lumière, il est possible de se concentrer sur une des énigmes. Chacune des équipes d’élèves tentera de résoudre l’énigme en question qui sera alors abordée lors du bilan.

Pour les groupes scolaires, le temps du bilan est beaucoup plus long que pour les visites habituelles. Il est très important de permettre à chacune des équipes de s’exprimer sur les activités qui ont été réalisées pour qu’ils en tirent le maximum de connaissances. Ce temps de bilan permet aussi de déconstruire les idées reçues sur la lumière qui pourraient encore persister chez certains.

Pour conclure

Ce type de pédagogie qui permet d’apprendre en s’amusant – et surtout d’apprendre en faisant – a tendance à laisser une plus grosse empreinte sur la mémoire des visiteurs. En tant que médiateur, nous pouvons nous aussi laisser un souvenir fort qui aidera les jeunes à se rappeler de Luminopolis, et donc de leurs découvertes sur la lumière.

Dans Luminopolis, le médiateur n’est donc pas simplement un médiateur, c’est aussi un maître du jeu. Il joue un rôle principal dans l’immersion des visiteurs et dans leur expérience, tout en apportant un contenu scientifique supplémentaire et en veillant à la bonne compréhension des concepts clés. Bien qu’étant déjà un formidable outil de médiation en soi, Luminopolis ne serait pas complète sans ses Maîtres de la Lumière.